- Une mutation culturelle dans la relation d’aide
- Une voie psychanalytique
- Une voie jungienne
- Une voie symbolique
- Une voie intérieure
- Le psychanalyste intérieur
- L’intégration symbolique selon Lacan
- À l’intérieur et à l’extérieur
L’obstacle essentiel à la capacité de réponse est cependant toujours la difficulté de naître, sortir effectivement de la fusion incestueuse primordiale de l’individu avec l’origine matricielle, fusion qui l’amène à se laisser inconsciemment identifier à tous les modèles transgénérationnels qui passent à travers la mère et à tous les ordres établis de la famille et de la culture. Le risque est que le grand œuvre de différenciation et de refondation opéré par le Soi au travers du processus des rêves demeure à l’intérieur de l’analysant, ne soit pas acté avant longtemps à l’extérieur dans son rapport concret à la vie. Le risque est que le combat spirituel que mène le Soi pour la transformation de l’individu de l’intérieur de sa psyché ne soit pas relayé (ou difficilement relayé) à l’extérieur par le combat de son moi pour changer sa vie : proclamer sa voie (singulière) du «mandala» dans le monde et face à lui, en s’abandonnant résolument à l’extérieur à l’influence intérieure du Soi.
A l’intérieur, l’attraction matricielle de l’origine et l’ordre préétabli dans l’inconscient sont systématiquement confrontés dans le travail du rêve, et acheminés vers leur détrônement, et le sujet va ainsi d’élargissement de conscience en élargissement de conscience au cours de ce travail. Cependant on constate qu’il est souvent difficile pour le moi de traduire directement ces élargissements de conscience en transformation concrète de la vie et du rapport à son environnement extérieur.
Jung suggère que la finalité spirituelle d’une analyse est la réalisation du Soi dans la vie du sujet : celui-ci est en quelque sorte appelé à devenir le plus possible le «vase» alchimique du Soi, ou, autrement dit, à laisser advenir le plus possible dans sa vie le mandala psychique harmonieux que désire le Soi pour lui : «que Ta volonté soit faite et non la mienne !». Le moi cependant ne peut que résister. Au sein de son environnement, il baigne dans une identité établie toute puissante, préformée en lui depuis l’origine, pour laquelle en général le Soi ne représente rien de sérieux, qui n’est pas prête à lui faire confiance, qui préfère conserver ou réactiver sans cesse son fonctionnement habituel, son système de défense, plutôt que de s’abandonner à ce que lui suggère son processus intérieur. A l’intérieur (pour suivre notre exemple), ses rêves lui montrent le possible de se structurer de manière nouvelle sur une figure de père ou de mère positifs. Mais à l’extérieur, dans sa culture consciente, il est pendant longtemps vite repris par la crainte persistante que seules les figures négatives existent et triomphent.
Le point le plus aveugle de résistance tourne le plus souvent autour de l’intégration du féminin (en l’homme comme en la femme), à savoir la capacité symbolique d’ouverture et de relation à l’autre. Cette capacité est trop marquée dans les lignées transgénérationnelles et la culture par la souffrance et la nécessité de s’en protéger. Et il est difficile pour le moi d’envisager jusqu’au bout de mettre en acte une refondation de cette capacité. Celle-ci est pourtant préparée au cours du processus analytique intérieur, et, redisons-le, un élargissement de conscience s’offre pour ainsi dire régulièrement de l’intérieur au moi. Celui-ci reçoit certes cet élargissement, au cours, par exemple, d’une séance d’analyse de rêves fort interpellante, mais en même temps, et pendant très longtemps dans son analyse, il n’arrive pas en définitive à l’acter. Son processus intérieur en tient compte et repart pour ainsi dire en arrière, jusqu’à recréer les conditions d’une nouvelle interpellation, et ainsi de suite. On voit comment cette résistance risque d’allonger indéfiniment la durée d’une psychanalyse.
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